Gravitation
BD numérique
Bon voyage Monsieur Newton !
Y a-t-il de la gravité dans l'espace ? C'est ce que les Grandiloquents vont devoir vérifier dans la mise en scène de Micromégas où le géant de Voltaire voltige de globe en globe comme un oiseau de branche en branche...
Partager cet épisode avec vos élèves
-
Vue d'ensemble
Dans cet épisode, les personnages discutent de l'adaptation au théâtre du conte "Micromégas" de Voltaire, alors qu'ils s'entraînent dans une salle d'escalade. Leur discussion les amène à s'interroger sur la présence de la gravité dans l'espace, en considérant l'état d'impesanteur d'un astronaute. Ils découvrent d'abord que, comme la vitesse de chute libre ne dépend pas de la masse, du point de vue de quelqu'un qui tombe, les autres objets qui tombent en même temps semblent flotter en impesanteur. Le mouvement ou l'absence de mouvement dépend donc du point de vue. Ils réalisent ensuite que, du point de vue de la Terre, un astronaute en apesanteur dans une station spatiale est en mouvement orbital. De même, le mouvement de l'astronaute est le même que celui de la station spatiale, même si leur masse est très différente, exactement comme la chute libre. Les personnages utilisent finalement l'expérience de pensée historique du "canon de Newton" à la fin de leur pièce, afin de comprendre les points communs entre la chute libre et le mouvement orbital : les deux peuvent être reliés de manière continue en fonction de la vitesse horizontale.
Cet épisode et le contenu pédagogique associé vise ainsi à construire des premiers arguments qualitatifs pour justifier l'extrapolation de la force de gravité dans l'espace : si nous interprétons la chute libre sur Terre avec la force de gravité, et que le mouvement orbital des astronautes est "le même type de mouvement" que la chute libre, alors nous devrions interpréter le mouvement orbital avec la gravité également. Il devrait donc y avoir une gravité dans l'espace ! -
Points de vue des élèves
L'idée qu'il n'y a "pas de gravité dans l'espace" est très répandue chez les élèves, selon la littérature de recherche sur l'enseignement de la physique (Kavanagh & Sneider, 2006). Elle peut être liée à d'autres conceptions répandues, dont les suivantes :
- Les objets en orbite n'ont pas de poids, la gravité ne les affecte donc pas (=> il n'y a donc pas de gravité dans l'espace).
- La gravité nécessite la présence d'air (=> il n'y a donc pas de gravité dans l'espace).
- La force de gravité diminue très rapidement à mesure que l'altitude augmente (=> jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de gravité dans l'espace).
Ces idées peuvent être mises en relation avec les images d'astronautes en impesanteur, très répandues dans les médias. Le terme gravité étant associé dans le langage courant au phénomène de chute, le fait que les astronautes ne tombent pas mais "flottent" semble impliquer qu'il n'y a pas de gravité dans l'espace, selon un raisonnement commun qui peut se résumer ainsi : "pas de chute, pas de gravité".L'invalidité de cette logique, du point de vue de la physique, réside dans le fait que la notion de force de gravité - ou force gravitationnelle - permet de rendre compte non seulement de la chute verticale ou parabolique, mais aussi du mouvement orbital dans l'espace. Les astronautes en apesanteur dans leur station spatiale, vus du centre de la Terre, se déplacent en effet dans un mouvement circulaire autour de la Terre.
-
Approche didactique
L'objectif de l'épisode est de comprendre les premiers arguments pour se convaincre qu'il y a une gravité dans l'espace, même si ce n'est pas intuitif à première vue.
Dépasser la logique initiale "pas de chute, pas de gravité" (pour l'astronaute en apesanteur), c'est comprendre comment la notion de gravité peut être étendue au mouvement orbital, visuellement très différent de la chute. L'enjeu pédagogique est donc de mettre en évidence les liens entre chute libre et mouvement orbital.
Le premier lien est établi en considérant la chute libre du point de vue du corps qui tombe : il perçoit sa situation comme un état d'apesanteur, tout comme le ferait, de son propre point de vue, un astronaute en orbite dans l'espace. Un deuxième point commun (qui est une autre façon de voir le premier) peut être mis en évidence en considérant le fait suivant : l'apesanteur d'un astronaute à l'intérieur (ou à l'extérieur) d'une station spatiale implique que l'astronaute a la même trajectoire et la même vitesse que la station spatiale, même si leurs masses sont très différentes. Ce fait peut être comparé à la chute libre des corps sur Terre, où l'on sait que la vitesse ne dépend pas de la masse (lorsque l'influence de l'air est négligeable). Cette considération constitue la spécificité majeure de l'approche conceptuelle. Bien qu'il s'agisse d'une information accessible lorsque l'on se concentre sur l'absence de poids, la relation de cette observation avec l'indépendance de la masse de la chute libre n'est presque jamais mise en évidence.Après avoir mis en évidence ces points communs dans le chapitre 2, le chapitre 3 présente le schéma historique du "canon" de Newton, dans lequel les différentes trajectoires de la chute d'un objet sont considérées en fonction de la vitesse donnée au départ. Ce schéma montre la continuité entre la chute libre et le mouvement orbital, et permet de comprendre les liens qui les unissent. Chute verticale, chute parabolique et mouvement orbital peuvent alors être considérés comme trois cas d'un même type de mouvement, à savoir le mouvement lié à la gravité. Par conséquent, contrairement à l'idée a priori prise comme point de départ : la gravité est bien présente dans l'espace. C'est pour étendre son domaine de validité que l'on utilise le terme de "gravitation".
-
Perspectives historiques et épistémologiques
Elément historique
Dans cet épisode, le principal élément historique utilisé est le "canon de Newon" proposé par Newton dans "De mundi Systemate" en 1685 (publié en 1728). Cette expérience de pensée représente différentes trajectoires pour la chute d'un boulet de canon en fonction de la vitesse donnée.
Perspective épistémologique
Après plus de 2000 ans de distinction entre les mondes terrestre et céleste, Newton a établi un lien physique fort : les phénomènes de chute libre sur Terre et de mouvement orbital dans l'Espace peuvent être compris comme un même type de mouvement, interprété par une même force. Cette force généralise la notion de poids aux astres : la force centripète associée à leur révolution est finalement leur poids. La gravité est universelle.
Le système mondial peut alors être décrit d'une seule manière, la même force expliquant les mouvements terrestres et célestes. En unifiant la Terre et le Ciel, Newton a donné naissance au concept d'Univers.
Après Newton, toutes les lois fondamentales de la physique ont été considérées (implicitement) comme "universelles", ou recherchées comme telles. Mais le point de départ d'une telle ambition venait de la physique elle-même : il fallait trouver une première loi valable partout pour pouvoir supposer que toutes les autres le seraient aussi.
-
Pistes d'utilisation
Prérequis
Un prérequis essentiel concerne le phénomène de chute libre. Même s’il est très courant, les premiers essais en classe de séances utilisant la BD ont montré que beaucoup d’élèves de seconde peuvent rester très étonnés du fait que la vitesse de chute d’un objet soit indépendante de sa masse, quand l’influence de l’air est négligeable. Leur focalisation sur ce point a détourné l’attention des informations venant dans la suite du récit, visant à relier mouvement de chute et mouvement orbital. Il est ainsi fortement recommandé de faire un rappel de cette observation en amont de la séance, afin que les élèves puissent davantage se focaliser sur le chapitre 2.
Ressource possible : Vidéo d’une expérience de chutes dans une enceinte sous vide (Brian Cox, Nasa)Pour démarrer : quel est le problème scientifique ?
Après une première lecture individuelle de la bande dessinée par les élèves, il peut être utile de commencer par expliquer le problème physique qui apparaît dans le premier chapitre : "La gravitation est-elle présente dans l'espace ou non ? Pour ce faire, on peut interroger les élèves sur la position des différents personnages sur cette question et sur leurs arguments.
De la BD à la physique : lecture collective avec questions
Après une lecture individuelle, il est possible de proposer une lecture collective avec une vidéoprojection de la bande dessinée, dont le rythme est contrôlé par l'enseignant. Celui-ci peut alors poser des questions sur certains moments clés. Par exemple, les moments suivants :
Le but de cette question est de faire le lien entre l'indépendance de la masse en chute libre et l'impesanteur.
Réponse: la même, car la vitesse en chute libre ne dépend pas de la masse.Cette question permet de tester la compréhension de la dépendance du point de vue dans la description du mouvement.
Réponse: il peut être en mouvement, d'un autre point de vue.Poser la question de la masse vise à faire prendre conscience qu'il y a une grande différence entre les deux. Se concentrer sur cette caractéristique peut aider à réaliser que le mouvement est le même, bien que les masses soient très différentes, comme pour la gravité.
Réponse: plus de 400 tonnes !Réponse: c'est une caractéristique de la chute libre : même mouvement quelle que soit la masse !
De la physique à la BD
Une fois les scènes interprétées, il est possible d'adopter l'approche inverse : demander aux élèves d'illustrer des énoncés généraux de physique à l'aide d'images spécifiques de la bande dessinée. Il est également possible de leur faire relier explicitement les points communs entre la chute et le mouvement orbital. Voici un exemple d'exercice (version modifiable ci-dessous).
-
Ressources complémentaires
Document A
Document B
-
Exemple de séquences d'enseignement
Proposition 1 : Séquence d'enseignement à deux classes
- Première séance (1h)
Lecture individuelle (5 minutes)
Après une première lecture individuelle de la bande dessinée par les élèves, il peut être utile de commencer par expliquer le problème physique qui se pose dans le premier chapitre : Cela peut se faire en interrogeant la position des différents personnages sur cette question et leurs arguments.
Questions sur le chapitre 2 (20 minutes)
Une étape importante du travail en classe sur la bande dessinée est d'attirer l'attention des élèves sur les scènes clés pour lesquelles une réflexion est nécessaire afin d'appréhender les idées physiques qui permettront de répondre au problème initial. Il s'agit des deux changements de point de vue mis en scène dans le chapitre 2 : la chute vue "de l'intérieur" (p.8), et l'état d'apesanteur vu "de l'extérieur" (p.46). Un exemple de questionnement est donné dans le document A ci-dessous. Après avoir interprété les scènes, vous pouvez également adopter la démarche inverse : illustrer des énoncés de physique générale à l'aide d'images spécifiques de la bande dessinée. En formulant ces affirmations, vous pouvez aussi mettre clairement en évidence les similitudes entre la chute et le mouvement orbital. C'est ce qui est proposé dans le document B ci-dessous, par exemple.
Travail sur les documents A et B (20 minutes)
Une fois ces points communs mis en évidence, la question de leur explication peut être posée : comment comprendre que ces mouvements, qui semblent si différents, partagent les mêmes caractéristiques ? L'expérience de pensée du " canon newtonien " évoquée au chapitre 3 permet alors de comprendre la continuité entre ces différents mouvements, justifiant ainsi leurs points communs. L'extrait de livre du document A ci-dessus propose une interprétation originale de ce schéma. A ce stade, le lien entre les différents éléments n'est peut-être pas encore très clair pour les élèves. Un lien explicite peut être nécessaire. Le document B en donne un bref aperçu. Il précise notamment la différence entre les termes "gravité" et "gravitation", et indique que le mouvement orbital peut être associé à la gravitation. Il ne reste alors plus qu'une étape à franchir pour que les élèves déduisent que la gravitation est bien présente dans l'espace, ce qui répond au problème initial.- Deuxième classe (1h)Le deuxième cours consiste à travailler sur la reconstitution du raisonnement qui permet de répondre au problème initial. Après avoir relu l'épisode de la bande dessinée, ils reçoivent la consigne suivante : Beaucoup de gens pensent qu'il n'y a pas de gravité dans l'espace, pensant aux astronautes qui "flottent". En vous basant sur la bande dessinée et sur le travail effectué lors du cours précédent, rédigez un court texte visant à convaincre les gens que, malgré l'apesanteur des astronautes, la gravité existe bel et bien dans l'espace". Cette tâche pouvant s'avérer assez difficile pour les élèves, différents niveaux d'aide intermédiaire peuvent être nécessaires.- Deuxième séance (1h)
Le deuxième cours consiste à travailler sur la reconstitution du raisonnement qui permet de répondre au problème initial. Après avoir relu l'épisode de la bande dessinée, ils reçoivent la consigne suivante : Beaucoup de gens pensent qu'il n'y a pas de gravité dans l'espace, pensant aux astronautes qui "flottent". En vous basant sur la bande dessinée et sur le travail effectué lors du cours précédent, rédigez un court texte visant à convaincre les gens que, malgré l'apesanteur des astronautes, la gravité existe bel et bien dans l'espace". Cette tâche pouvant s'avérer assez difficile pour les élèves, différents niveaux d'aide intermédiaire peuvent être nécessaires.
3 mo
Crédits
-
Script
Lau Bergey
-
Illustration
Barbara Govin & Aline Rollin
-
IT development
Clément Partiot
-
Design
Gauthier Mesnil-Blanc
-
ISBN
978-2-9593956-1-1